Le Bangladesh est traversé par trois des plus grands fleuves du monde, le Gange (la Padma), le Brahmapoutre (la Jamuna) et la Meghna. C’est un pays de mousson où, paradoxalement, les problèmes liés à l’eau sont aigus : inondations souvent catastrophiques, aggravées par les cyclones, approvisionnement difficile en saison sèche, mauvaise qualité bactériologique des eaux de surface, insuffisance des réseaux de distribution et d’assainissement en milieu urbain, etc. En outre dans les années 1980-1990, est apparu un nouveau problème : la contamination de nombreux puits par l’arsenic. Enfin, et ce n’est pas le moindre des défis, le Bangladesh est l’un des pays le plus directement menacé par le changement climatique !

ce PSF ou filtre à sable permet d'améliorer la qualité de l'eau et ainsi d'éviter des problèmes de santé.

Pond Sand Filter

Des filtres à sable dans les Sundarbans

La précarité de la population rurale des Sundarbans (la partie du Bangladesh qui borde la baie du Bengale) est accrue par les conditions naturelles (effets des tempêtes et cyclones, élévation du niveau de la mer, intrusion du biseau salé induite par les pompages, salinisation des nappes et des terres) et par la faiblesse des infrastructures (transport, santé).
L’accès à l’eau potable est un vrai problème, les nappes phréatiques superficielles sont fréquemment saumâtres et les nappes profondes parfois contaminées par l’arsenic. L’eau des « ponds » (mares pérennes alimentées par les pluies de mousson et non asséchées pendant la saison sèche) proches des habitations est donc la principale ressource en eau douce.

Mais les risques de maladies infectieuses transmises par l’eau sont élevés. Aussi, GK a initié en 2012 des installations de filtres à sable pour potabiliser l’eau des mares pérennes (Pond Sand Filters, PSF) dans les zones où il intervient depuis le cyclone SIDR en 2007.

Co-responsablilité de l’accès à l’eau

L’objectif est de permettre aux populations concernées de devenir, avec GK, co-responsables de l’accès à l’eau, en participant à la réalisation matérielle et à l’entretien des filtres à sable et en gérant, avec l’appui des coopératives, la distribution de cette eau aux familles, afin de contribuer à l’amélioration de la santé des enfants et adultes et de libérer les femmes et les filles de la « corvée d’eau ».

La mise en oeuvre de PSF a été développée au début des années 2000 par des ONG spécialisées comme WaterAid, avec l’aval du gouvernement. Son principe est le suivant : l’eau est prélevée dans une mare pérenne, généralement une mare préexistante qui est approfondie pour passer sans difficulté la saison sèche et protégée par une clôture pour éviter toute pollution par les déjections animales. Elle est pompée à la main par les habitants et passe dans une série de chambres de filtration remplies de briques concassées et de sable fin. Elle devient ainsi bactériologiquement saine.

Le sable doit être nettoyé ou renouvelé régulièrement tous les trois ou quatre mois. Pour ce faire, des habitants volontaires sont formés au cours de trois sessions par les techniciens de GK et deviennent responsables d’entretien. Outils et pièces détachées indispensables leur sont distribués. Des réunions régulières insistent sur l’importance de cet entretien. Des tests de qualité de l’eau sont effectués par un laboratoire.

La taille du dispositif est adaptée à celle de la population desservie : 40 à 50 foyers par unité de filtration (PSF), soit quelque 200 à 300 personnes pour chaque filtre. En pratique, on constate, sur le terrain, que certains PSF servent aussi à alimenter des villages voisins non encore desservis.

Les bénéficiaires constatent une quasi-disparition des maladies d’origine hydrique, ce qui confirme l’impact positif indéniable sur la santé. Un temps précieux est gagné pour les femmes et des économies sont réalisées sur l’achat de médicaments.

Mare pérenne

Plusieurs projets menés à bien.

Depuis 2012, GK a implanté, avec le soutien du Comité Français et de différents co-financeurs (Fondation SUEZ, Ville de Paris, Région Centre, Agence de l’Eau Loire-Bretagne, Département du Cher, France Liberté) plusieurs programmes de création de PSF. Ainsi, entre 2012 et 2019, 210 unités de filtration ont été remises aux communautés organisées en coopératives. La population ainsi desservie excède 40 000 personnes. La collecte des redevances mensuelles dues par l’usager (50 takas par famille et par mois, soit environ 50 centimes d’euro) permet de payer les responsables d’entretien supervisés par les équipes de GK. C’est un facteur essentiel de la durabilité du programme. Une enquète locale indépendante a montré que la totalité ou presque de ces installations (98%) sont toujours opérationnelles.

En revanche, il a été observé que de nombreuses unités de PSF, construites par différents organismes publics ou privés depuis 1977 afin de résoudre l’énorme problème de l’approvisionnement en eau potable dans ces zones, sont devenues inactives en raison de problèmes techniques et de gestion. La raison principale de ce fiasco réside dans le fait de n’avoir pas veillé à constituer un collectif de gestion et mettre en place un gardien ou une équipe de maintenance, avec une formation appropriée.

PSF en cours de réhabilitation

PSF hors service en cours de réhabilitation.

Pour faire face à la crise de l’eau potable dans ces régions, l’administration locale et les représentants du public ont demandé à GK de réhabiliter progressivement les unités inactives dans ces régions. A la suite de cette demande, GK a identifié 1 000 PSF inactifs à Motbaria, 361 à Sharankhola et 50 à Patharghata. GK a observé que, moyennant une dépense correspondant au tiers du coût d’un nouveau PSF construit, 40 à 50 familles peuvent être approvisionnées en eau potable par PSF réhabilité. Grâce à ce programme, GK souhaite réhabiliter 300 PSF en trois ans et permettre, ainsi, à 12 000 familles, soit 56 400 personnes, de satisfaire leurs besoins en eau potable.

En 2023, un premier programme triennal de réhabilitation (100 par an) a été entrepris par GK avec le soutien du CFS et de la Fondation SUEZ.

Installation de latrines et sensibilisation à l'hygiène

 

Les programmes comprennent aussi l’installation de latrines familiales. Il est, en effet, très important de mener frontalement la question de l’accès à l’eau salubre et celle de l’accès à l’assainissement, qui constituent l’objectif  N°6 du programme de développement durable des Nations Unies (ODD) pour 2030. Ainsi,en 2019, 110 latrines ont été construites. Les propriétaires sont formés à l’entretien et au développement de compost pour l’agriculture. Le programme triennal en cours pour la réhabilitation des PSF hors service comporte également la mise en place de près de 500 latrines familiales.

GK intervient aussi régulièrement dans les écoles pour dispenser une formation à une hygiène de base. En 2019, l’ONG a assuré la formation de 1100 écoliers, à parité garçons/filles dans 12 écoles.

Golfe du Bengale où se rejoignent les fleuves descendant de l'Himalaya

changement climatique

Le problème de l'arsenic

C’est en voulant protéger la population des maladies d’origine hydrique graves, en particulier les diarrhées, causées par l’utilisation des eaux des rivières et des étangs, que l’UNICEF a fait forer à partir de 1972, plus de 3 millions de puits tubés avec pompe à main.
Le gouvernement et les particuliers ont, de leur côté, installé 5 ou 6 millions d’autres pompes à main. On s’est cependant rendu compte à partir de 1988 en Inde et un peu plus tard au Bangladesh, que l’eau de beaucoup de ces puits tubés contenait des taux d’arsenic pouvant atteindre 0,50 mg/litre et plus, donc bien supérieurs au taux maximum admissible de 0,01 mg/litre recommandé par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et même au taux de 0,05 mg/litre, limite acceptée par les autorités sanitaires du Bangladesh.

Le Comité Français de Soutien s’est, dès 2002, montré attentif au problème de la contamination de l’eau par l’arsenic.

L’origine de cette contamination a fait l’objet de diverses hypothèses, mais il est désormais admis qu’elle est liée à la présence d’arsenic dans certaines couches géologiques d’alluvions provenant des massifs himalayens et alimentant les nappes profondes (jusqu’à 150 m) exploitées par les puits tubés.
Selon diverses sources, près de la moitié de la population aurait été approvisionnée par de l’eau contaminée, à des taux plus ou moins élevés, dans la majorité des 64 districts du pays, surtout au sud et à l’est du Gange. Selon L’OMS, le nombre de personnes souffrant de lésions de la peau liées à la consommation d’eau contaminée est estimé à 1,5 million. Des milliers d’autres personnes ont été atteintes par d’autres maladies (gangrènes, cancer-poumon, vessie) apparaissant après des expositions prolongées, et en seraient mortes.

Contamination par l’arsenic au Bangladesh

Le Comité Français de Soutien (CFS) s’est, dès 2002, montré attentif au problème de la contamination de l’eau par l’arsenic. Lors d’une visite sur place en novembre 2003, des membres du CFS ont constaté la gravité de la situation, en rencontrant, en particulier, des malades dont le pronostic vital était en jeu et la vie quotidienne tragiquement bouleversée. La décision a alors été prise par GK de lancer un programme spécifique, avec le soutien financier du CFS.

Filtres collectifs et domestiques

Ce programme porte sur la réduction de l’arsenic dans l’eau à des niveaux inoffensifs par la mise en oeuvre de filtres collectifs ou individuels. Ces solutions ne sont pas inédites ; elles ont déjà été mises en oeuvre au Bangladesh même, par des initiatives locales et avec des procédés et matériaux locaux.
Le programme présenté par GK que le CFS a décidé de prendre en charge en 2007, comprenait trois opérations différentes :
– la mise en place de 5 filtres pour éliminer l’arsenic, installés en tête des puits tubés existants, contaminés par l’arsenic, pour desservir chacun une population de 50 à 100 familles,
– la mise en place de 10 filtres pour éliminer l’arsenic, installés au niveau d’une famille,
– la mise en place de 5 filtres pour de l’eau de retenues (a priori sans arsenic mais pouvant être polluée et trouble, avec une quantité microbiologique la rendant non potable sans risques infectieux) pour alimenter des villages de populations tribales dans les Chittagong Hill Tracts (CHT).

Sollicité par le bureau du CFS, le Syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable du Maine-et-Loire a accordé un soutien de 2500 euros.

A noter que le Syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable de la région de Coutures (Maine-et-Loire), sollicité par un membre du bureau du CFS, a accordé à ce programme un soutien de 2500 euros dans le cadre de la loi Oudin-Santini, qui permet aux collectivités territoriales et aux agences de l’eau, de financer des actions de solidarité internationale, dans la limite de 1% de leurs ressources.

Réseau de distribution d'eau 2008-2010

 

Château d’eau de SATURIA

Un projet plus ambitieus et qui représentait aux yeux du Dr. Zafrullah Chowdury une solution prometteuse a été réalisé par GK à titre expérimental à Saturia, en collaboration avec des ONG locales et l’aide de la Banque Mondiale : un réseau de distribution d’eau par tuyaux en PVC mis en place à partir d’un puits tubé creusé à une profondeur correspondant à des nappes phréatiques sans arsenic.
Saturia est une localité située dans le district de Manikganj, à 50 km au nord-ouest de la capitale du Bangladesh, Dhaka, et à 30 km de Savar, siège de GK.
Une enquête socio-économique a été faite pendant la phase d’étude, sur la population à desservir. C’est une population travaillant à plus de 70% dans l’artisanat, le petit commerce et les services, et disposant de moins de 2 euros par jour.
Le réseau, dont la réalisation a débuté en 2007, était prévu pour desservir 1000 foyers et une quarantaine d’établissements (écoles, bureaux, lieux de culte…). Faute de crédits suffisants, le réservoir de stockage prévu n’avait pas pu être réalisé dès l’origine, et le réseau était alimenté directement par la pompe d’exhaure. La pompe ne marchant que quelques heures par jour, la pression dans les tuyaux variait, ce qui peut accélérer la dégradation des tuyaux, et obligeait à rejeter une partie de l’eau à la sortie de la pompe d’où un gâchis en termes d’énergie et de ressource. les habitants souhaitaient donc la construction d’un réservoir pour pallier ces inconvénients.
Le projet présenté par GK a paru bien étudié et réaliste au CFS, qui a donc décidé de financer sa construction, courant 2008, pour un montant de 25 000 euros. Comme pour le programme des filtres, un co-financement a été obtenu auprès des collectivités territoriales (Région Ile-de-France et Syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable de la région de Coutures dans le cadre de la loi Oudin-Santini).

Le réservoir a été inauguré en décembre 2009, en présence des participants à la mission du Comité Français.

Le projet initial comportait un réservoir en béton armé de 136 m3 soutenu par des piliers en béton. Pour des raisons notamment de coût, il a été substitué par un ensemble de 9 réservoirs en plastique alimentaire de 10 m3 sur une plate-forme soutenue par une structure métallique. cette modification ne porte pas atteinte à la viabilité de l’installation. Mais l’extension du réseau initial restait à compléter en 2013 : le nombre de foyers raccordés ne permettait pas encore à cette date de couvrir les frais du personnel, payé par le comité des usagers, et du fonctionnement (électricité pour la pompe, entretien).
GK continue à soutenir le comité d’usagers afin d’étudier les mesures qui s’imposent pour étendre le réseau et mettre en oeuvre une gestion durable de l’ensemble des installations. Le CFS a complété sa contribution initiale pour aider GK dans cette tâche.